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De la JCR à la Ligue
- n° 2256
- Date : 12 juin 2008

Le 12 juin 1968, le gouvernement dissout par décret onze groupes d’extrême gauche, dont la Jeunesse communiste révolutionnaire et le Parti communiste internationaliste. Dans la foulée, deux animateurs de la JCR, Alain Krivine et Pierre Rousset, sont emprisonnés.

Pour le courant « marxiste révolutionnaire », la dissolution de la Jeunesse communiste révolutionnaire (JCR) et du Parti communiste internationaliste (PCI) constitue un tournant dans une histoire passablement agitée. Animé par Pierre Frank, le PCI était, à l’époque, la section française de la IVe Internationale, une petite organisation de cadres trotskystes, qui pratiquaient un entrisme clandestin au sein du Parti communiste depuis le milieu des années 1950. Du fait de l’hégémonie du PCF sur le mouvement ouvrier et de l’absence de toute démocratie en son sein, cette tactique n’avait donné que peu de résultats, si ce n’est dans la jeunesse scolarisée, notamment étudiante.

Dès le début des années 1960, l’Union des étudiants communistes, qui regroupait l’ensemble des courants de la gauche révolutionnaire (trotskysme, maoïsme) était entrée en crise : sa direction échappait au contrôle du PCF et se réclamait des thèses du Parti communiste italien. Alain Krivine animait le courant de gauche, dont le principal bastion était le secteur « Sorbonne lettres », en opposition ouverte. À l’automne 1965, lorsque le PCF décida de soutenir la candidature de François Mitterrand dès le premier tour de l’élection présidentielle, le secteur « Sorbonne lettres » s’y refusa et fut exclu, de même que l’ensemble de ce courant.

Dans la foulée, à quelques centaines, les exclus créèrent la Jeunesse communiste révolutionnaire. Habituellement caractérisée de « trotsko-guévariste », la JCR se revendiquait des thèses de l’Opposition de gauche au stalinisme, mais elle ne se référait formellement ni au trotskysme ni à la IVe Internationale (bien que beaucoup de ses fondateurs en aient été membres). Outre la bataille idéologique qui, en ces années-là, faisait rage dans la gauche étudiante, la JCR menait de nombreuses activités internationalistes, dont le soutien à la Révolution cubaine et, surtout, la solidarité avec les peuples d’Indochine victimes de la guerre menée par les États-Unis. Elle joua un rôle moteur dans l’impulsion et la construction d’un cadre unitaire de mobilisation, le Comité Viêt-nam national (CVN).

Vers la Ligue communiste

Lorsque survient Mai 68, à l’extrême gauche alors en expansion, la JCR est loin d’être la plus nombreuse ou la mieux implantée dans le monde du travail. À vrai dire, elle est même nettement surclassée par les courants maoïstes ainsi que par Voix ouvrière et l’Organisation communiste internationaliste, ancêtres respectivement de Lutte ouvrière et du Parti des travailleurs. Mais, dès le début, la JCR va se trouver naturellement en phase avec le mouvement : elle participe (avec les anarchistes) à la création du Mouvement du 22 Mars ; début mai, elle transforme son meeting à la Mutualité (prévu de longue date) en « meeting du mouvement », y invitant les leaders étudiants à prendre la parole ; elle joue un rôle actif le 10 mai, lors de la fameuse « nuit des barricades », au Quartier latin. En mai, chaque jour, la JCR tient un meeting dans la cour de la Sorbonne et elle diffuse une feuille d’agitation quotidienne. À Paris comme en Province, elle sera de toutes les manifestations, se battant pour l’organisation démocratique du mouvement et pour la liaison entre la jeunesse et les travailleurs en grève.

Durant l’été 1968, deux dirigeants de la JCR alors dissoute – Daniel Bensaïd et Henri Weber – rédigent Mai 68, répétition générale, où ils essaient de tirer à chaud les leçons du mouvement étudiant et de la grève générale ouvrière et de tracer des perspectives politiques. Parallèlement, l’organisation tente de se reconstruire et de stabiliser les sympathisants gagnés au cours du mouvement. En fait, cette réorganisation se fera autour de Rouge, « journal d’action communiste », d’abord quinzomadaire, dont le premier numéro paraît le 18 septembre 1968. La discussion s’ouvre au sein des cercles de diffuseurs de Rouge (CDR), véritables instances de base de la nouvelle organisation en gestation, sur la base d’une conviction commune : ce qui a manqué en Mai 68 et empêché de transformer le mouvement étudiant et la grève ouvrière en révolution socialiste, c’est l’absence d’un parti révolutionnaire décidé à poser la question du pouvoir politique. Mais quel type de parti faut-il construire ? Quelle affiliation internationale ? Comment utiliser l’impact des révolutionnaires dans la jeunesse scolarisée pour gagner l’écoute des salariés et y contester l’hégémonie du PCF ? Autant de questions auxquelles, à l’issue de plusieurs mois de débat (et de centaines de pages de textes et de contributions…), répondra le congrès de fondation de la Ligue communiste, réuni en avril 1969 à Mannheim (Allemagne) par crainte de la répression…

Appréhension « triomphaliste »

Il y est décidé de construire non le « parti de Mai », mais un parti révolutionnaire assumant pleinement « l’héritage trotskyste ». À commencer par des références appuyées au parti bolchevik, notamment les conceptions politico-organisationnelles développées par Lénine dans Que faire ? : parti d’avant-garde, regroupé sur un programme politique extrêmement délimité (en fait, une vision globale du monde et de l’histoire) ; sélection des militants, conçus comme des « révolutionnaires professionnels » ; nécessité de ne pas se cantonner à l’animation des mobilisations, mais aussi de mener la lutte politique sur toutes les questions posées à la société ; démocratie dans la discussion (avec droit de tendance) et discipline dans l’action, etc. De même, le vote de l’adhésion de la nouvelle organisation à la IVe Internationale apparaît à la fois comme la manifestation d’une fidélité au combat des trotskystes contre le stalinisme et comme l’exigence d’un internationalisme en actes. Enfin, le congrès se fixe comme objectif de construire une organisation implantée dans les entreprises, notamment en y développant un « travail syndical » et en utilisant la force de frappe que constituent les sympathies gagnées en Mai dans la jeunesse scolarisée pour faire, dans ce secteur, la démonstration pratique de ses méthodes d’action radicales.

À la différence des organisations maoïstes – qui ont le vent en poupe dans les premières années de l’après-1968 –, la Ligue communiste ne s’illusionne pas sur le fait que la « trahison de 68 » aurait définitivement réglé le problème de l’emprise des « réformistes » – notamment PCF et direction de la CGT – sur le mouvement ouvrier. Pour autant, l’air du temps de l’époque, des liens privilégiés avec les secteurs les plus radicaux de la société, quelques premiers succès et un sentiment d’urgence face aux explosions sociales à venir conduisent assez vite à une appréhension « triomphaliste » de la situation politique et des possibilités ouvertes à la Ligue. Une tentation ultérieurement pondérée par le défi de la montée en puissance de l’Union de la gauche et, surtout, l’implantation grandissante des militants de la Ligue dans le mouvement social. Mais c’est là un autre chapitre…

François Duval


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